C’est un constat alarmant pour les restaurateurs : il est difficile de recruter. Chronophage, chère, la recherche et la formation de personnel dans l’hôtellerie-restauration tourne parfois au casse-tête, notamment en province. Témoignage et retour d’expérience de deux restaurateurs qui se démènent pour trouver des salariés.
“C’est du jamais vu”, analyse Paul Pourel qui a repris il y a trois ans en périphérie de Poitiers Le Moulin de la Norée et qui tente de recruter 6 collaborateurs. “Je me tourne vers la gastronomie donc j’ai besoin de personnel formé, qualifié. Aujourd’hui, j’en suis réduit à chercher des bras. “ Les métiers de l’hôtellerie-restauration pâtissent d’un manque d’attractivité. Certes, l’image de la cuisine s’est améliorée, des émissions télévisées comme Top Chef contribuant à en redorer le blason. Reste que, côté salle, “il y a tellement de préjugés à déconstruire !”
Actionner différents leviers
Après une saison estivale éreintante pour son équipe en sous-effectif, Paul Pourel accorde trois semaines de congés à ses 12 salariés. En octobre, il provoque une réunion avec l’Umih, le Medef et le député de la Vienne. L’idée ? Mettre tout le monde autour de la table pour trouver des solutions. Parallèlement, il augmente les salaires de tous ses employés de 10 % : “Payer plus, je suis entièrement d’accord, mais l’équilibre financier est de plus en plus difficile à trouver.” Il tente de doubler ses équipes pour permettre à chacun de prendre 2 jours de congés hebdomadaires consécutifs. Mais, face au désert des candidatures, il est contraint de réduire la voilure côté salle pour ménager ses collaborateurs. Il passe à 45 couverts contre les 55 habituels et ferme 2 jours par semaine. “Refuser des clients, après 7 mois d’inactivité, c’est extrêmement frustrant”, reconnaît-il. C’est également intégrer un cercle vicieux, car moins de couvert signifie moins de rentrées de trésorerie…
Message choc
À Châtellerault, Laura Hémon, du restaurant Hémon, a enchaîné les pas d’heures à défaut de trouver des collaborateurs. “J’ai tenté de passer par Pôle Emploi. J’ai sélectionné des profils, aucun n’a répondu. J’ai contacté la conseillère qui m’a assurée de s’occuper très vite de mon dossier. Je n’ai pas de nouvelles depuis trois semaines…” Laura Hémon décide d’agir par elle-même. Elle installe un panneau au message choc devant son établissement. “J’ai reçu énormément de CV, de tout, mais un seul candidat qualifié. Il demandait un salaire mirobolant : sachant qu’on s’arrache ses compétences, il a fait monter les enchères. J’ai donc embauché une personne qu’il faut former. Le point positif, c’est qu’en faisant un peu de tapage, ça fonctionne.”
Pourquoi pas l’intéressement ?
Aujourd’hui, Paul Pourel réfléchit à l’intéressement de ses salariés pour attirer des candidats et motiver ses salariés sur du long terme : “Je pense que c’est un bon moyen pour attirer, et il est légitime de verser à chaque membre de l’équipe une part du gâteau. J’aimerais mettre en place ce système qui concerne 14 % des entreprises en France tous secteurs confondus et seulement 2,7 % des entreprises dans le secteur de la restauration. Mais encore faut-il dégager des bénéfices… Dès que j’en dégage, j’y vais !” Une autre clé d’implication est mise en exergue par les deux restaurateurs : la considération.
source : https://www.lhotellerie-restauration.fr/journal/emploi/2021-12/restauration-recruter-contre-vents-et-marees.htm