83 – Var Anticipant les difficultés de recrutements, des professionnels ont repensé les conditions proposées aux saisonniers et revu leur stratégie. En devenant plus attractifs, ils ont su se démarquer et attirer du personnel.
Dès le début de l’année, Fabrice Gouin, directeur de La Bastide du Calalou à Moissac-Bellevue (Var), a bien compris que « si on passait après tout le monde, on aurait personne ». Hôtel et restaurant ouvert à l’année mais avec une forte activité en été, il a, cette année, fait le pari d’embaucher en CDI dès le mois de février plutôt que des saisonniers. « Cela nous a coûté 20 000€ sur les mois de février et mars, mais ça a sécurisé toute la saison. Tout le monde est formé et rôdé, prêt pour monter en charge. Dès le printemps, on n’a plus refusé de clients au restaurant faute de personnel. L’année dernière, on bloquait le restaurant à 40 couverts, là, on peut monter à 80 sans problème. »
Respecter les heures, une attente forte
Si Soizic Bogliorio, directrice de l’Hôtel & Spa Les Gorges du Verdon, Le Provence et le Styx à La Palud-sur-Verdon (Alpes-de-Haute-Provence), a longuement hésité à installer une pointeuse, elle constate finalement une perception positive de ses salariés : « Ils sont rassurés et plus en confiance. » Même son de cloche à l’hôtel Lily of the Valley (La Croix-Valmer, Var), où chaque minute de dépassement est payée. « On souffre d’une image de pénibilité et des excès faits par certaines maisons », constate Stéphane Personeni, le directeur qui gère jusqu’à 390 salariés au plus fort de la saison. « On doit les rassurer sur les conditions, le respect des heures et la qualité de vie qu’ils peuvent avoir autour de leur travail », ajoute-t-il.
Soizic Bogliorio a également constaté lors de ses recrutements que les jeunes saisonniers préféraient faire moins d’heures, avoir moins de stress et pouvoir profiter des loisirs alentours pendant leurs jours de repos. À La Bastide du Calalou, Fabrice Gouin a augmenté l’effectif en cuisine, passant de 6 à 8 salariés : « Avec un salarié et demi en plus, on évite les heures supplémentaires, on a roulement pour que chacun puisse prendre ses repos et récupérations. » Le chef Éric Guerin (La Mare aux oiseaux à Saint-Joachim, en Loire-Atlantique) constate aussi que l’effort sur les jours de repos paie : « J’ai une liste d’attente [de candidats NDLR] et je reçois tous les jours des appels de jeunes desespérés qui ne veulent plus subir nos métiers mais les vivre pleinement », écrivait-il sur les réseaux sociaux le 17 juin.
La coupure est aussi un sujet de découragement. Au Bello-Visto à Gassin (Var), bien que chaque salarié reçoive une prime de 20 € par jour travaillé en coupure, Sylvain Humbert constate que ce n’est pas suffisant et envisage lui, aussi, pour la saison 2023, de fermer certains jours pour assurer les congés. Soizic Bogliorio a doublé son équipe de serveurs au Styx pour leur dégager du temps libre et sait qu’une des clés se trouve là.
Le logement, une condition indispensable
Situé dans l’arrière-pays varois, Fabrice Gouin loge, pour la première fois, tout son personnel. « Cela aide beaucoup pour attirer des candidats. » Même constat dans les gorges du Verdon pour Soizic Bogliorio : « On loge toute notre équipe mais on a une capacité limitée. Avec plus de logements, on pourrait doubler nos équipes et proposer des contrats en continu. C’est ce sur quoi on travaille pour l’année prochaine. »
Dans le Golfe de Saint-Tropez, Stéphane Personeni loge 267 salariés en misant sur une proposition de qualité (piscine, parkings, navettes vers l’hôtel) pour être attractif et va encore plus loin en embauchant une super-intendante qui gère les petits problèmes quotidiens des saisonniers.
Travailler sa réputation
Pour autant, aujourd’hui le salaire et les avantages ne sont plus les seuls éléments décisifs. « Le confort de travail, la possibilité d’évoluer, d’accéder à de la formation font partie de ce que l’on propose pour attirer », détaille Stéphane Personeni qui a embauché une personne pour travailler leur marque employeur. Philippe Colinet, chef au restaurant Colette à l’Hôtel Sezz à Saint-Tropez (Var) a lui constaté que sa réputation de chef bienveillant et pédagogue paye. « C’est un travail de long terme mais je me suis rendu compte que mon nom circulait chez les saisonniers. » Là aussi, comme pour le chef Éric Guerin, le résultat est positif puisqu’il a reçu suffisamment de CV pour constituer une équipe de cuisine complète dès l’ouverture de l’établissement.
source : l’hôtellerie restauration